Le génial Deep End sort ces jours-ci dans une superbe édition Blu-ray chez Carlotta. Idem pour Essential Killing parmi les dix meilleurs films de l’année 2011, chez Studiocanal. C’est occasion de se pencher à nouveau sur l’œuvre de Jerzy Skolimowski photo en tête de texte, une des plus belles du cinéma moderne. Jerzy Skolimowski, né en 1938, fut une figure marquante du nouveau cinéma polonais des années 60 aux côtés de Roman Polanski avant de devenir un cinéaste insaisissable, à la carrière déroutante. Signes particuliers de Skolimowski à la fois poète et boxeur, acteur et réalisateur, franc-tireur et farouchement individualiste, comme en témoignent ses premiers films et ceux qui suivront, tournés un peu partout dans le monde. Walkover est le deuxième long métrage de Skolimowski, après Signe particulier néant 1964. Il y interprète le rôle principal, celui d’un étudiant désœuvré qui a raté son diplôme d’ingénieur et qui erre dans des paysages industriels incertains, jamais à sa place dans une Pologne en voie de modernisation. Rencontres pittoresques, humour grinçant, jeunes femmes agaçantes, mais surtout inventivité permanente de la mise en scène. Skolimowski, sans doute sous influence godardienne, comme beaucoup d’autres à l’époque, bouscule la syntaxe cinématographique, les bonnes manières et les habitudes. Le film débute par une image gelée, puis le regard caméra d’une jeune femme en gros plan, quelques secondes avant qu’elle ne se jette sous un train arrivant en gare. C’est de ce même train que va descendre le héros » de Walkover, trentenaire qui va accepter par dépit de participer à un tournoi de boxe amateur. Lui aussi regardera régulièrement la caméra dans des plans fixes où il semble jauger le spectateur, lui imposer des plans miroirs où se reflète une image inconfortable de la condition d’homme, entre rébellion et désillusion, parfaitement intemporelle malgré l’ancrage historique du film dans la post Nouvelle Vague européenne. Skolimowski est un cinéaste de l’énergie, mais d’une énergie vaine. Il s’agit plutôt de dépense. Son personnage est sans cesse en mouvement, mais il fait du sur place, marche à reculons ou reviens en arrière le plan, a la fois allégorique et d’une impressionnante vigueur physique, où le cinéaste saute d’un train en marche pour rejoindre le lieu qu’il venait de quitter, prisonnier de la société, incapable d’échapper à un présent stérile et à un futur guère excitant. Athlétique, il doit sa victoire sur le ring non pas à sa force mais à un gag humiliant qui donne sa signification au film le walkover » du titre, qui désigne dans le vocabulaire de la boxe une victoire par abandon. Skolimowski, comme son collègue Polanski, ne va pas supporter longtemps la censure politique de la Pologne communiste. Après La Barrière 1966, Haut les mains est interdit l’année suivante par la censure il faudra attendre 1981 pour qu’il soit projeté sur un écran. Skolimowski quitte son pays et commence une carrière erratique d’exilé perpétuel, filmant d’abord en Belgique le magnifique Départ, très proche des films de Godard il lui emprunte Jean-Pierre Léaud, génial en garçon coiffeur rêvant de devenir champion de course automobile, en Italie Les Aventures du brigadier Gérard que Skolimowski considère comme son pire film. Heureusement son installation en Grande-Bretagne lui sera plus profitable. Deep End 1970, grâce à la ressortie providentielle du film en salles cette année, puis en DVD et Blu-ray, dans une magnifique copie restaurée merci Bavaria et Carlotta a permis de revoir ce film culte, sans doute le plus beau de Skolimowski et l’un des meilleurs des nouveaux cinémas européens des années 60-70. On a pu dire que les meilleurs films anglais modernes avaient été réalisés par des étrangers Blow Up d’Antonioni, Répulsion de Polanski et surtout Deep End de Jerzy Skolimowski. En règle générale, les films des grands cinéastes en exil possèdent une qualité d’étrangeté et d’observation qui les rend fascinants. Skolimowski dans Deep End ne quitte presque jamais les locaux d’une piscine filmés à Munich, coproduction oblige !, mais un coin de rue, une entrée de boîte de nuit et un bout de campagne enneigée suffisent à restituer le Londres de l’époque, beaucoup moins glamour que celui d’Antonioni mais absolument authentique, avec ce mélange de mauvais goût, d’ambiances glauques et de candeur érotique. Considéré à juste titre comme un des meilleurs films jamais réalisés sur l’état d’adolescence thème déjà traité dans les premiers films de Skolimowski et son premier long métrage hors de Pologne Le Départ tourné en Belgique avec Jean-Pierre Léaud, Deep End fut longtemps confiné à un culte confidentiel en raison de sa rareté, seulement visible dans de pauvres copies 16mm ou 35mm en mauvais état qui avaient survécu aux outrages du temps depuis le début des années 70, période sinistrée des nouveaux cinémas du monde entier dont la redécouverte est toujours autant d’actualité. Ceux qui avaient eu la chance de le découvrir par hasard en gardaient un souvenir ébloui. Ils n’avaient pas rêvé. La ressortie providentielle de Deep End en apporte la preuve éclatante. Le film enfin restauré avec ses rutilantes couleurs pop venant balafrer la grisaille londonienne est chef-d’œuvre de mélancolie et de cruauté, ancêtre pas si lointain des teen movies » sensibles signés Gus Van Sant dans son exploration pleine d’empathie des émois définitifs de l’adolescence. C’est un film de peintre ce que le réalisateur deviendra lorsqu’il cessera de mettre en scène pendant dix-sept ans, de poète ce qu’il avait été avant de faire des films mais aussi de boxeur autre activité du cinéaste dans sa jeunesse, qui a maintenu dans tous ses films une violence incisive, une précision du geste et une énergie virile qui n’appartiennent qu’à lui. Un jeune garçon timide devient employé dans des bains publics de l’East End londonien. Chargé d’assister les clientes, il découvre un univers clos où la promiscuité et la nudité humides des corps sont propices à divers échanges et trafics pas très éloignés de la prostitution. Il s’amourache surtout de sa collègue, une belle fille à la réputation facile qu’il épie et tente maladroitement de séduire. Deep End a l’idée géniale d’inverser les rôles au garçon de jouer les pucelles effarouchées devant les avances sexuelles des rombières ménopausées, tandis que la fille Jane Asher, fiancée de Paul McCartney au moment du tournage, cynique et libérée, s’amuse avec les hommes et les envoie balader à la première occasion. La beauté de porcelaine de John Moulder Brown, petit prince prolo et héros rimbaldien de ce roman d’apprentissage désastreux en vase clos ajoute au charme fou d’un film tour à tour drôle et tragique, où explose l’art de Skolimowski ce mélange de poésie et de trivialité, d’énergie et de morbidité que l’on a retrouvé intact dans ses derniers opus, le superbe Quatre Nuits avec Anna film du grand retour au cinéma après dix-sept ans d’absence consacrée à la peinture, dans une retraite improbable à Malibu, et aussi retour à la terre natale polonaise, que j’avais montré en ouverture de la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes en 2009 et le non moins génial Essential Killing en 2011 encore une histoire de désir vital et de voyage vers la mort. J’avoue n’avoir jamais vu Roi, dame, valet d’après Nabokov, dont l’échec laissera Skolimowski six ans sans tourner et Le Cri du sorcier film sur la folie avec Alan Bates, Susannah York et John Hurt. Douze ans après Deep End, Skolimowski réalise un deuxième chef-d’œuvre à Londres, Travail au noir. Un film ouvertement politique, mais avant tout une aventure humaine absurde et obsessionnelle, comme toujours chez le cinéaste. Décidé et filmé dans l’urgence, Travail au noir répond au traumatisme du coup d’état polonais de décembre 1981, vécu de loin par l’exilé perpétuel Skolimowski. Le contremaître Novak et trois maçons polonais viennent travailler au noir à Londres pour effectuer des travaux dans la maison d’un riche compatriote. Lorsque Novak, le seul à parler anglais, apprend la nouvelle du coup d’état militaire, il décide de ne pas en informer les ouvriers, de les maintenir dans un état d’ignorance et de retarder le plus possible l’échéance de leur retour impossible au pays. Encore un film de claustration, Travail au noir est l’histoire d’un projet insensé voué à l’échec et la métaphore astucieuse de la douleur d’un pays et de ses exilés. Jeremy Irons, plus que crédible en travailleur polonais, y livre une performance extraordinaire. Après ce chef-d’œuvre, la carrière de Skolimowski va continuer d’avancer en zigzags, avec un film bizarre sur a création et l’exil Le Succès à tout prix, tourné entre Paris et Londres et deux adaptations littéraires à moitié académiques et plutôt ratées Les Eaux printanières et Ferdydurke. Mais avant ces films décevants, Skolimowski réalise en 1986 l’excellent Bateau-phare, qui prolonge la thématique de la difficile relation père fils déjà au cœur du Succès à tout prix dans les deux films l’adolescent est interprété par le propre fils de SKolimowski, Michael Lyndon. Unique film véritablement américain de Skolimowski, cinéaste habitué aux productions apatrides, Le Bateau-phare entretient pourtant une relation ambigüe avec sa terre d’accueil. C’est un film qui reste au large du cinéma américain comme de son territoire, puisque l’essentiel de l’action se déroule en mer, sur un bateau-phare chargé de surveiller les côtes. Pourtant, Skolimowski s’acquitte de sa commande un film noir hustonien, quasi remake de Key Largo tout en signant un film très personnel l’un des premiers scénarios de Skolimowski, Le Couteau dans l’eau de Roman Polanski, était déjà un huis clos maritime. Le Bateau-phare s’organise autour de deux duels psychologiques, l’un entre un père et son fils, l’autre entre le père, capitaine d’un bateau-phare, et un gangster en cavale. Selon la règle des tournages confinés, l’histoire du film a contaminé son tournage, avec des affrontements d’ego entre Klaus Maria Brandauer dont la ressemblance physique avec Skolimowski n’est pas fortuite, puisqu’il joue le père de Michael Lyndon, son fils et le cinéaste, ainsi que des rivalités professionnelles entre Brandauer et son ennemi à l’écran, Robert Duvall. En adoptant un classicisme de façade et sans trop se soucier des conventions du genre, Skolimowski est parvenu à conserver la tension et l’énergie de ses plus grandes réussites les contingences de la réalité ont toujours nourri son art. Ce goût du mouvement – parfois immobile – et de l’absurde, de la fuite et de l’épuisement se retrouve démultiplié dans le dernier film en date de Jerzy Skolimowski, chasse à l’homme qui offre à Vincent Gallo l’occasion d’une impressionnante performance masochiste, le génial Essential Killing 2011, un des chefs-d’œuvre sortis cette année dans les salles françaises et qui lui aussi est désormais disponible en DVD et Blu-ray, édité par Studiocanal. Indispensable, cela va sans dire.
Voustrouverez ci-dessous la(les) réponse(s) exacte(s) à LE PERE ETAIT PEINTRE LE FILS CINEASTE que vous pouvez filtrer par nombre de lettres. Si les résultats fournis par le moteur Jusqu’au 5 octobre, l’ancien Évêché d'Uzès présente Morceaux choisis de l’histoire de l’art XIXe et XXe siècle. 32 œuvres peinture et sculptures de 16 artistes issus de collections privées. Le Sud est le trait d’union entre les artistes présentés à Uzès. Tous y sont venus ou en sont issus. Le Sud et sa lumière. Le Sud et son "soleil qui écrase les sujets et accentue la couleur" souligne Marc Stammegna, commissaire de l’exposition. Expert international de l’œuvre de Monticelli, à l’origine de la Fondation Monticelli à Marseille, grand collectionneur, Marc Stammegna est venu s’installer il y a peu à Saint-Quentin-la-Poterie. De sa rencontre avec le maire d’Uzès est née une belle complicité et l’idée de créer cette exposition temporaire exceptionnelle, grâce à des prêts gratuits, issus du réseau de collectionneurs privés de Marc Stammegna. Marc Stammegna, Emmanuel Renoir et Jean-Luc Chapon, autour du tableau de Renoir représentant son fils, le futur cinéaste Jean Renoir. L’arrière-petit-fils de Renoir présent à Uzès Trente-deux œuvres de seize artistes de renom lire ci-contre dont certaines pièces ont rarement été exposées comme celle de Picasso, deux fois en 40 ans ou même jamais. C’est le cas d’une peinture d’Auguste Renoir représentant son fils, Jean, enfant, qui deviendra cinéaste. Jean était le grand-oncle d’Emmanuel Renoir, arrière-petit-fils du peintre. Emmanuel Renoir était présent lors du vernissage à Uzès, se disant "ému " de découvrir le tableau familial. "Renoir adorait le côté familial, il a réalisé une centaine de tableaux de ses proches ou de l’entourage familial, de sa maison… Il aimait transmettre ce qu’il avait autour de lui sans but commercial." Le commissaire de l’exposition affirme n’avoir eu aucun mal à convaincre les collectionneurs à prêter une ou plusieurs pièces pour une première exposition de cette envergure à Uzès. "Tous ont été convaincus d’avoir à Uzès un écrin exceptionnel ", note Marc Stammegna qui a trouvé une adhésion immédiate à ce projet de l’ensemble de la municipalité, "depuis l’adjoint de la culture, la conservatrice du musée, jusqu’aux services techniques" qui ont dû aménager en un temps très court des pièces de l’ancien Évêché, sous le musée Georges-Borias. "Le directeur régional de la Drac a été aussi très à l’écoute et a compris notre démarche." Un énorme effort a été fait sur la sécurité, tant au niveau matériel qu’en moyens humains avec des équipes de sécurité permanentes. Pour Jean-Luc Chapon, cette exposition est une grande fierté et la concrétisation d’un vieux rêve. La ville, labellisée d’art et d’histoire qui compte déjà deux festivals renommés avec les Nuits musicales et Uzès danse, ajoute une nouvelle dimension à son offre culturelle. "Avec notre musée, notre nouveau centre culturel, il nous manquait une grande exposition et surtout un chef d’orchestre. On l’a trouvé avec Marc Stammegna", conclut le maire. Preuve de l’engouement pour Uzès, Marc Stammegna affirme pouvoir déjà présenter les expositions des trois prochaines années. Ouvert tous les jours sauf le lundi Exposition au premier étage de l’ancien Évêché, 1 place de l’Évêché, tous les jours sauf le lundi de 10 h à 19 h jusqu’au 5 octobre. Tarif 7 €. Tarif réduit 5 €. Visite commentée 10 €. Tarif réduit 8 €. Billets en vente sur place à l’Office de tourisme, 16 place Albert 1er, ou à l’office municipal de la culture, 1 Place du Duché. Également en ligne sur et sur Cinq visites commentées par le commissaire de l’exposition et la conservatrice du musée Borias auront lieu à 18 h jeudi 19 mai, mardi 28 juin, jeudi 21 juillet, jeudi 18 août et jeudi 8 septembre.Pratique «Renoir père et fils», Muséed'Orsay, 1, rue de la Légion-d'Honneur, Paris, jusqu'au 27 janvier.Tél. 00331 40 49 48 14, site du mardi au dimanche de 9h30Imprimer E-mail Il est toujours difficile d'être le fils de son père, surtout lorsqu'on se nomme Renoir et que l'un, Jean, aspire par le cinéma à partager la célébrité de l'autre, le peintre, Pierre-Auguste. Toute sa vie, le cinéaste Jean Renoir a vécu dans l'ombre de son père, avec le sentiment d'être un raté. Dans la Règle du Jeu, film de 1939, interprétant le rôle d'Octave, il confie à sa partenaire, Nora Gregor, sur le perron du château de la Ferté Saint-Aubin, ce lourd secret qui lui pèse et dont il ne parvient pas à se défaire. Boudé par le public, si ce n'est à l'occasion de la sortie d'un seul film, La Grande Illusion de 1937, il a le sentiment de ne pas être à la hauteur de ce père à l'égard duquel il nourrit un sentiment de culpabilité. On le mesure dans La Chienne, film de 1931, dans lequel Jean Renoir raconte la déchéance d'un employé de banque, interprété par Michel Simon, qui vend tous les tableaux qu'il peint à ses heures de loisir pour entretenir sa maîtresse, une femme de mauvaise vie. Cette fiction, malgré son issue tragique, n'est pas sans rapport avec la réalité que connaît Jean Renoir, lui qui a épousé Catherine Hessling, dernier modèle de son père et actrice de ses premiers films. C'est pour elle qu'il dilapide son patrimoine en vendant les tableaux de son père. Peine perdue. Le succès n'est pas au rendez-vous. Ainsi un sentiment d'échec et de honte va l'habiter toute sa vie et parcourir toute son oeuvre. Le souvenir de ce père dont il se sent redevable, le hante. Sur le tard, alors que sa santé déclinante l'oblige à une activité réduite, c'est encore à son père qu'il consacre son temps en écrivant ce merveilleux livre autobiographique qu'il intitule tout simplement Pierre-Auguste Renoir, mon père. Il est très tentant aujourd'hui, lorsque l'on revoit Partie de campagne, de mesurer, dans ce petit film de 1936 l'influence picturale du père. Jean Renoir va tourner ce film dans cette propriété familiale de Marlotte, où Pierre-Auguste Renoir venait, avec des amis peindre sur le vif les canotiers sur le Loing. De même, plus de vingt ans plus tard, il plantera le décor du Déjeuner sur l'herbe dans le domaine des Collettes, aujourd'hui Musée Renoir de Cagnes-sur-Mer où Pierre-Auguste Renoir, sur la fin de sa vie venait peindre tout en soignant ses rhumatismes déformants. On pourrait s'amuser à repérer et compter les plans de Partie de campagne qui renvoient, telles des citations, aux tableaux non seulement de son père mais également d'autres peintres qui travaillaient sur les mêmes motifs comme Caillebotte ou Monet. Mais on se tromperait lourdement si l'on croyait que Renoir cherche à reproduire dans son film ces modèles picturaux prestigieux. D'ailleurs les plans qui semblent le plus relever de l'école impressionniste, ne sont pas de Renoir mais de collaborateurs qui les exécutèrent en l'absence du patron » occupé à la préparation de son film suivant, Les Bas-Fonds. Pour bien comprendre ce rapport qu'il entretient avec la peinture, il faut souligner que Jean Renoir a vécu, toute sa vie, dans un environnement de peintres et c'est tout naturellement que son imaginaire s'est nourri des motifs , des sujets qui les ont inspirés. Les reflets des ciels changeants sur la surface de l'eau en mouvement, les vibrations lumineuses dans les frondaisons, les plaisirs des guinguettes au bord de l'eau construisent l'univers d'un cinéaste qui était d'abord le fils d'un peintre ». Le goût de la nature, l'amour des femmes qui habitent tous les films de Renoir relèvent de cet héritage sur lequel il revient dans ses Ecrits 1926-1971 Très souvent, des amis me demandent si je puis me considérer comme un élève de mon père. A cela, je leur réponds très fermement que non, je suis certainement influencé par mon père parce qu'on est toujours influencé par ses parents. Si j'avais été le fils d'un horticulteur, il est probable que je m'y connaîtrais en fleurs, en plantes, en jardins. Etant fils de peintre, il est évident que la peinture m'intéresse et, quand on regarde la peinture, eh, bien, la peinture vous influence. » S'il est un motif, dans ce film, qu'il emprunte à l'œuvre picturale du père, c'est bien sûr celui de la balançoire par laquelle Henriette, l'héroïne, interprétée par Sylvia Bataille, excite la curiosité et le désir des canotiers. Loin de recopier le tableau de son père, il s'en démarque. Alors que seule la mère est sur la balançoire du peintre, le cinéaste met en scène deux femmes, Henriette et sa mère et finit par isoler la première qui finit par s'exposer, avec toute l'innocence d'une vierge, aux regards des autres personnages et de la caméra. A la fixité du cadre pictural, Jean Renoir répond par la mobilité de sa caméra qui tourne autour du portique comme pour éliminer les gêneurs que sont la grand-mère, le mari et le fiancé, et isoler les deux femmes qui s'offrent alors aux regards chargés de convoitise des canotiers, des jeunes garnements, des séminaristes en promenade et bien sûr des spectateurs. Le cinéaste relève dans cette séquence un double défi. Tout en cherchant à s'affirmer face à l'œuvre de son père, il s'impose des contraintes techniques au service de son projet. En positionnant la caméra sur la balançoire, l'image animée de mouvements verticaux est à même de traduire le vertige éprouvé par Henriette mais aussi par les différents voyeurs, spectateurs compris que les dessous de la jeune fille excitent. Ainsi Jean Renoir s'écarte-t-il de la référence paternelle pour retrouver à travers elle un tableau de Fragonard, intitulé Les Hasards heureux de l'escarpolette, tant admiré par Pierre-Auguste Renoir. Ce dialogue que Jean Renoir noue avec la peinture est au service de sa stratégie narrative. La peinture, comme le cinéma posent le problème du regard qui peut se faire voyeur. A partir de cette séquence construite en référence à cette œuvre picturale, la caméra, dans Partie de campagne, a toujours un temps d'avance sur les personnages, comme si le destin de Henriette était conditionné par les attentes des spectateurs. Alors, juste avant de céder au canotier entreprenant, elle jette aux spectateurs, en gros plan, ce regard caméra , regard interdit qui les débusque dans leur position confortable de voyeur. Ainsi la balançoire, de motif pictural devient un motif cinématographique. Jean Renoir se démarque de l'œuvre de son père qui l'a nourri pour construire son regard de cinéaste. Au-delà de cet exemple célèbre, on comprend pourquoi Jean Renoir, malgré ses insuccès ou la piètre opinion qu'il pouvait avoir de lui-même, est considéré par tous les grands cinéastes comme la référence absolue, le maître, le patron. C'est certainement à l'influence de son père qu'il le doit. Dans son livre autobiographique, Pierre-Auguste Renoir, mon père, il rappelle que ce père, tant admiré, resta jusqu'au jour de sa mort à l'affût du motif ». Cette attitude de chasseur qui consiste à peindre devant le sujet pour mieux saisir la lumière et retranscrire avec toute la fraîcheur de la spontanéité, la sensation éprouvée devant le motif, on la retrouve dans toute l'œuvre cinématographique de Jean Renoir. Se démarquant de ses contemporains et même de bon nombre de réalisateurs d'aujourd'hui, il a toujours adapté, par l'innovation, la technique et l'a mise au service de l'acteur. Pour lui, ce n'est pas le scénario qu'il s'agit de suivre mais l'acteur poussé à l'improvisation par le metteur en scène. Par un jeu complice, chacun donnant le meilleur de lui-même, les sentiments les plus profonds s'expriment et les situations s'enrichissent de cette émotion contenue, donnée en partage aux spectateurs. C'est la grande leçon que Jean Renoir nous a donnée et c'est à son père qu'il la doit. Louis d'Orazio Si vous êtes adhérent, identifiez-vous pour pouvoir commenter l'article LesMiyazaki : cinéastes de père en fils ! Publié par Andres Camps le 28 juin 2019. Le studio Ghibli est le fruit du travail de nombreuses personnes dont les plus célèbres restent encore aujourd’hui Hayao Miyazaki, Qui ? Quand ? Pourquoi ? La question a été tournée, retournée des dizaines de fois. Sans toutefois que le voile du mystère ne se lève. Le dernier à s’être frotté à la chose est un cinéaste espagnol de 36 ans. Samuel Alarcon. Il a signé un documentaire Le crâne de Goya », prix du meilleur scenario au festival de Madrid et retenu au FIPA 2019, coproduit par les Bordelais de Marmita Films J’ai eu le...Qui ? Quand ? Pourquoi ? La question a été tournée, retournée des dizaines de fois. Sans toutefois que le voile du mystère ne se lève. Le dernier à s’être frotté à la chose est un cinéaste espagnol de 36 ans. Samuel Alarcon. Il a signé un documentaire Le crâne de Goya », prix du meilleur scenario au festival de Madrid et retenu au FIPA 2019, coproduit par les Bordelais de Marmita Films J’ai eu le fantasme que la vérité surgisse, que l’on puisse retrouver ce crâne… », souffle-t-il. Goya, un réfugié à Bordeaux L''institut Cervantes, à Bordeaux Francisco Goya passe les huit derniers mois de sa vie au 57 cours de l'Intendance, à Bordeaux. Petit retour en arrière. Francisco Goya y Lucientes s’installe à Bordeaux en 1824. Il a 78 ans, n’entend plus rien et ne parle pas un mot de français. Mais jouit d’une immense renommée, d’où sa charge de peintre à la cour d’Espagne. Or, l’absolutisme du roi Fernando VII le pousse à l’exil. Le génial Aragonais prétexte une cure thermale à Plombières pour filer à l’anglaise et gagner les bords de Garonne. Il y retrouve une diaspora espagnole acquise aux idées libérales. Sa jeune compagne, Léocadia, s’installe avec lui et ses deux enfants. En quatre ans, la famille déménage quatre fois. Les huit derniers mois de sa vie , il les passe au 57 cours de l’Intendance, où est désormais installé l’Institut Cervantès. A Bordeaux, Goya fréquente ses compatriotes. Son grand âge ne le fait pas renoncer au travail. Au contraire. Il s’initie aux techniques de gravures. Surtout, il arpente la ville, un carnet de croquis à la main, assiste aux courses de taureaux, aux exécutions capitales place de la Victoire... Il existe 44 dessins jetés sur le papier qui racontent les Bordelais, vus par l’œil de Goya. De ce séjour, on retiendra aussi le premier chef d’œuvre de la lithographie et l’un de ses derniers chefs-d’oeuvre les quatre pièces baptisées Taureaux de Bordeaux. Et, bien sûr, la célèbre Laitière de Bordeaux », exposée au Prado à Madrid. L’oublié de la Chartreuse 16 avril 1828. 2 heures du matin. El pintor » s’éteint à 82 ans dans son appartement du cours de l’Intendance. La nouvelle se répand comme une traînée de poudre. Si bien que l’Église Notre-Dame est pleine quand les obsèques sont célébrées en fin de journée. Goya est inhumé au cimetière de la Chartreuse, dans la tombe de Miguel Martin Goicochea. Un ami proche qui est aussi le beau-père de Javier Goya, le fils du peintre. En froid avec son père, ce dernier ne vient à Bordeaux que huit jours après le décès. Il prend soin de faire rapatrier les meubles de son père. Pas son corps. Laissant au passage Léocadia dans le plus grand dénuement. Sur le cénotaphe de la Chartreuse il est gravé dans la pierre "A Goya". Les années passent. Goya est abandonné à l’oubli de l’exil. Un demi-siècle s’écoule. Et voilà qu’au hasard d’une visite sur la tombe de sa femme, Joachim Pereyra, le consul d’Espagne, aperçoit l’épitaphe sur un monument funéraire décati. Il se met en quatre pour rendre la dépouille de Goya à l’Espagne. Près de dix ans. C’est le temps qu’il aura fallu pour que les administrations française et espagnole accèdent à la légitime initiative du consul. Le 16 octobre 1888, ce dernier, accompagné de quelques témoins, dont le Bordelais Gustave Labat, regardent les fossoyeurs pénétrer dans la crâne de Goya a disparu ! Les ossements de deux corps gisaient épars sur le sol … Près de l’entrée se trouvaient les débris d’un colosse. C’était là ce qu’il restait de Goya. Seulement notre émotion fut bien vive. Sa tête avait disparu. Une main sacrilège l’avait dérobé. Où, quand, comment ? Stupeur ! Deux squelettes ont été sortis de leurs tombes. Le plus petit est entier. Le plus grand, manifestement celui de Goya, n’a plus de tête ! Pereyra pressent que la nouvelle pourrait compliquer le rapatriement. Il décide donc d’envoyer en Espagne les deux corps , celui sans tête de Goya et celui de Goicochea. En 1899, une fois les contraintes budgétaires et aléas administratifs levés, les ossements prennent, enfin, le chemin de à cette occasion, que le Bordelais Labat, témoin de l’inhumation, livre sa version des faits dans le bulletin de l’Académie des sciences, des belles lettres et des arts de Bordeaux Les ossements de deux corps gisaient épars sur le sol … Près de l’entrée se trouvaient les débris d’un colosse. C’était là ce qu’il restait de Goya. Seulement notre émotion fut bien vive. Sa tête avait disparu. Une main sacrilège l’avait dérobé. Où, quand, comment ? » A qui appartient la main sacrilège ? Des questions encore sans réponse. La vérité se trouve bien quelque part mais où ? Plusieurs hypothèses ont fleuri. Toutes convergent vers celle d’un adepte d’une science balbutiante au moment des faits la phrénologie. Une discipline qui consiste à étudier le caractère, le génie, le talent ou le vice d'un individu, d'après la forme de son crâne... Celui de Goya valait le coup d’oeil. Il se dit que l’artiste aurait donné son accord à son médecin, le Docteur Gaubric, pour procéder à l’examen post mortem. Le geste sacrilège aurait ainsi eu lieu dans le laboratoire de l’école de médecine de Bordeaux. C’est en tout cas ce que dit l’acte laissé par Gaubric glissé dans le cercueil. Il y est dit que le crâne a été remis à la dépouille. Mais il n’y est pas. Il serait tout simplement resté dans la salle d’anatomie. Et identifié comme tel. Un étudiant l’aurait sauvé de la fosse commune quand il s’est agi de renouveler l’ossuaire. Dans les années 1950 on trouve sa trace dans un bar espagnol des Capucins le Sol y Sombra. Au Sol y Sombra L’étudiant en médecine en aurait fait don à ce petit bout d’Espagne. C’est toujours ça. Lors des agapes estudiantines, il est de coutume d’aller s’incliner devant le héros national qui trône en évidence au fond du troquet. En 1961, un fait divers sonne le glas de l’établissement. On a d’abord cru à un meurtre. Il s’agissait en fait d’une banale, mais tragique, intoxication au gaz. Le rideau est tiré, tout le mobilier est repris par un brocanteur. Le crâne de Goya est aperçu pour la dernière fois sur son étal, au marché aux puces de Mériadeck. Goya est une figure à la hauteur de sa légende Luisa Castro, directrice de l’Institut Cervantès de Bordeaux. Le carabin cleptomane Une thèse séduisante. Dans son film, Samuel Alarcon, a procédé à une reconstitution méticuleuse des dernières heures de Goya. Il apparaît selon sa thèse, que Goya a été mis en terre en un seul morceau. Sa tombe a donc été profanée... Le cinéaste explore une voie loin de Bordeaux La peinture d’un crâne comme seul indice du crâne d’une peintre ». En l’occurrence une vanité intitulée Crâne de Goya », réalisée par le peintre Dionisio Fierros. Datée de 1849…. Or, à cette date, quarante ans avant la terrible découverte au cimetière de la Chartreuse, personne ne pouvait savoir que le crâne avait été dérobé. A moins que... Et puis les biographes disent de Fierros qu’il était un peintre d’une grande probité. Aussi, celui-ci n’aurait pu réaliser le tableau sans modèle original. Il y a fort à parier que le crâne a été volé et acheminé de l’autre côté des Pyrénées. Coïncidence troublante, avant d’être exposé au musée de Saragosse, le tableau était la propriété du Marquis de San Adrian. Or Goya lui avait tiré le portrait, l’un de ses plus beaux. Et les deux hommes étaient devenus amis lors de leur exil bordelais... Le petit-fils de Fierros passera sa vie à chercher le crâne de Goya. Il publie un essai en 1943 sous le titre Mon Grand Père a-t-il volé le crâne de Goya ? ». Le documentaire de Samuel Alcaron remonte patiemment cette piste pour parvenir à un dénouement… incertain. Mais qui accrédite une autre des thèses qui circule à Bordeaux. Celle d’un carabin espagnol, cleptomane et adepte de phrénologie qui aurait commis l’acte sacrilège…191 ans après sa mort, on ignore encore qui a volé le crâne de Goya. Et encore moins où il se trouve. Nile père, ni le fils ne s'étaient accordé un regard, et les seuls sourires du dernier furent adressés à Gladys dont on aurait dit qu'elle pourrait se mettre à fondre sur place. Le pater avait gardé l’œil torve et la moue sévère, mais ça restait usuel chez lui. Vargas n'avait pas écouté grand chose du laïus alors qu'il s'était repassé la discussion qu'il avait eu plus tôt